dimanche 30 décembre 2012

Henri Gervex, Rolla (1878)

Henri Gervex (1852-1929) est à la fois un parisien, de naissance et de coeur, et un grand voyageur.
  • Reçu en 1871 à l’Ecole des beaux-arts, il travaille avec Alexandre Cabanel.
  • Premier Salon en 1873 : avec la Baigneuse endormie.
  • 1876 : rencontre et amitié avec Edouard Manet qui influencera désormais sa peinture vers l’impressionnisme.
  • 1878 : Rolla, tableau influencé par un poème d’Alfred de Musset, est refusé pour indécence et exposé dans un magasin où se ruent les badauds.
  • 1880-1902 : voyages en Espagne, Angleterre (trois fois avec Auguste Rodin), Italie (avec Guy de Maupassant ), Belgique, Norvège, Bavière, Russie (3 fois), croisières en Italie, Turquie…
  • 1913 : Entrée à l’Institut de France.

Cette toile, peinte en 1878, provoqua un scandale lors de son exposition au Salon. Inspirée du poème d'Alfred Musset du même nom.

Rolla considère d'un oeil mélancolique 
La belle Marion dormant dans son grand lit ; 

Je ne sais quoi d'horrible et presque diabolique 

Le faisait jusqu'aux os frissonner malgré lui. 
Marion coûtait cher. Pour lui payer sa nuit, 
Il avait dépensé sa dernière pistole. 
Ses amis le savaient. Lui-même, en arrivant, 
Il s'était pris la main et donné sa parole 
Que personne, au grand jour, ne le verrait vivant. 
Quand Rolla, sur les toits, vit le soleil paraître, 
Il alla s'appuyer au bord de la fenêtre. 
Rolla se détourna pour regarder Marie. 
Elle se trouvait lasse, et s'était rendormie. [...]


"Le texte retrace le destin d'un jeune bourgeois, Jacques Rolla, sombrant dans une vie d'oisiveté et de débauche. Il rencontre Marie, adolescente qui se prostitue pour fuir la misère. On voit ici Rolla, ruiné, se tenant à coté de la fenêtre, les yeux tournés vers la jeune fille endormie. Il va bientôt mettre fin à ses jour en avalant du poison.
Si la scène est jugée indécente, ce n'est pas en raison de la nudité de Marie, qui ne diffère en rien des autres nus canoniques de l'époque. L'attention des contemporains se porte en réalité sur la nature morte constituée d'un jupon, d'une jarretière, d'un corset dégrafé à la hâte, surmonté par un chapeau haut-de-forme. C'est Degas qui aurait conseillé à Gervex de mettre "un corset par terre" pour que l'on comprenne que cette femme "n'est pas un modèle". En effet, cette disposition, la nature des vêtements, dessinent clairement le consentement de Marie et son statut de prostituée. De plus, la canne jaillissant des sous-vêtements agit comme une métaphore de l'acte sexuel." (source)


Pour plus d'informations autour de l'histoire du tableau.

jeudi 27 décembre 2012

Blues devil, babe


Longue absence, mais je profite de ma procrastinationnite aiguë pour poster une playlist, chose qu'on n'avait pas faite depuis un bail. D'habitude je balance des titres que j'aime bien un peu à l'arrache sans thème précis, mais là il se trouve que l'accumulation de cette vingtaine de morceaux a pris des accents blues qui ne me déplaisent pas, alors on dira que c'était fait exprès.
Au menu, Lee Fields, She keeps bees (dont on vous parlait à nos "débuts"), BMRC, le beau Dan Auerbach ou encore Beth Hart (l'un de mes 4186161786 modèles sur terre).


Théo Gosselin
"Ce qu'ils appellent du rock'n'roll, c'est du blues. Toujours la même histoire entre un homme et une femme! Il y a cinquante ans, la musique était brute, les gens jouaient sur de vieilles guitares déglinguées. Aujourd'hui on fait le ménage, la musique est plus propre, mais c'est la même histoire."
John Lee Hooker, 1994.
CQFD. 

lundi 8 octobre 2012

Marsatac édition 2012 dans les yeux de Véra.

Ça fait longtemps qu'on a pas posté par ici! 

Pour repartir du bon pied (j'allais dire "avec la rentrée", sauf que ça fait un mois que les cours ont repris pour les moins chanceux (genre moi)), un article sur Marsatac, le festival marseillais, bien installé depuis 14 ans dans la cité phocéenne. N'ayant pas eu la chance d'y participer l'année dernière, je ne pouvais pas passer à côté de l'occasion cette année. Autant vous dire que cette fois j'ai pas vraiment eu le choix vu que j'ai gagné deux places en participant à un concours bidon de la Caisse d'épargne. 



J'ai donc pu assister aux concerts du samedi. Au menu : Baxter Dury, Breakbot, La Femme, 2manyDjs et James Holden. 

On arrive assez "tard", aux alentours de 22h. L'ambiance est installée dès la sortie du métro Nationale. On est plusieurs à arpenter les ruelles en direction des énormes Docks des Sud. 

Scène 1, Baxter Dury chauffe le public depuis quelques minutes. Les premiers rangs sont occupés par des fans assez impatients (voire carrément lourds) de Breakbot. Ça bouge un peu, ça tape du pied. L'ambiance décolle enfin avec "Claire", morceau plutôt cool. Les voix féminines rend le tout assez peps tandis que Baxter nous susurre des mots doux en anglais. Le mec nous revendique clairement son besoin d'amour. Il se tortille beaucoup, la voix est langoureuse. Pour les fans d'électro ça passe assez mal, moi, je suis ravie. Histoire de nous réveiller, Baxter brandit la bouteille de Jack Daniels. Les chanceux du premier rang se voient offrir une rasade de whiskey dans leurs gobelets en plastiques à moitié remplis de bière. S'ensuit un gros pétage de câble. Baxter fait péter le piano, et tente une envolée lyrique qui tourne vite au délire psychopathe puisqu'il se met à rire comme un dément tout en chantant. Il nous avoue son amour pour Marseille (étonnant), son amour pour l'amour, trois petits tours et puis s'en va.


Les gens réclament Breakbot. 

23h, l'homme de CroMagnon débarque sous un tonnerre d'applaudissements. La devanture de ses platines est juste énorme: une énorme bouche aux lèvres rouges, bien kitchos et pop, tout à fait dans l'esprit breakbotien. Les lumières sont dingues, le son est parfait. Le set est très bien "goupillé", tout s'enchaîne parfaitement, aucune retombée. Gros moment kiff avec le remix de "Extraball" de Yuksek & Amanda Blank. Les gros tubes se font attendre, on trépigne de jumper sur Baby I'm Yours quand, sorti de nulle part, débarque Irfane. Ça réchauffe un peu l'ambiance, puisque Mister Berland ne nous décroche pas un seul mot (juste des mouvements de bras censés nous encourager à kiffer). 
En bref, on passe un super moment, ça jumpe, ça pogote, ça slamme, ça gueule, et on en redemande. 


Le concert fini, on file prendre l'air. Breakbot, plus fort que la gym suédoise.

Toujours scène 1, la Femme débarque. Gros changement d'ambiance. Les lumières sont bleues, bien blanches (j'étais contente d'avoir ramené mes lunettes de soleil sans déconner). On a affaire à une sorte d'électro/rock (le groupe revendique son genre comme "Surf / Trance / Tropicale", rien que ça). Ça fait tout de suite super "hipster" ont pensé certains dès que résonnent les premières notes de synthé. 
J'ai découvert ce groupe uniquement cette année, et je peux dire, sincèrement, que ce concert a été mon préféré. Déjà il y avait beaucoup de moins monde (moins d'ado prépubères ... référence au public précédent héhé), la chanteuse a une présence énorme sur scène, on s'ennuie jamais, on peut twister, headbanger, danser le rock, faire des choses cheloues avec son corps, tout passe; les musiciens changent de place à chaque morceau ce qui change des concerts où le bassiste reste à la droite du guitariste qui lui même est à la gauche du chanteur (je dis ça au pif bien sûr). Il y a vraiment un truc qui se passe quand commence "La Planche" (j'ai la chanson en tête non stop depuis). Pour un groupe aussi méconnu et "jeune", j'ai trouvé la performance remarquable. Moment délicieux avec "From tchernobyl with love" qui nous permet de se reposer un peu. Même si le morceau dénote avec ce set bien "punchy", ça reste cohérent. Seul bémol, les paroles sont en français mais on ne comprends absolument rien. 
Ça repart de plus belle avec "Antitaxi", le coup de grâce avant la tombée du rideau (non y'avait pas du rideau, je voulais juste le caler m'fais pas chier). Une "vague" s'installe (j'avais pas vraiment connaissance du phénomène jusqu'à présent). Je m'explique : un énorme cercle se crée juste devant la scène. La chanteuse nous fait le décompte, et au bout de "Five" ça vole en éclat. J'ai failli y laisser ma peau.
Gros coup de coeur en tout cas.


On file à la scène 3 (ouverte, THANK GOD), voir 2manyDjs. J'ai pas honte de dire que je connaissais absolument pas. Pas vraiment ma tasse de thé même si ça envoie du lourd. Il parait qu'ils ont réalisé un de leurs meilleurs sets. 



Retour à la scène 3, on a mal aux pattes, donc on se cale sur les barrières en attendant James Holden. Comme vous pouvez le voir, les marseillais sont des porcs. 



Minuit, l'heure du crime. Un certain Frédérique aux lunettes rondes nous annonce la couleur : "Tout ce qu'Holden touche se transforme en or". Je m'attends à tout et à rien, ne connaissant absolument pas sa musique.
James débarque en chaussons de la hype (des sortes de chaussettes Nike à coussinets, j'ai pas vraiment réussi à déterminer ce que c'était). Ça met du temps à démarrer, il faut se montrer patient avant que les rafales de beats pointent le bout de leur nez. L'ambiance est minimaliste. Je me retourne une ou deux fois pour voir comment les gens le vivent et je ne suis pas étonnée de voir une masse informe de gens se tortillant d'une manière étrange. On est tous transportés. Le petit James nous a emmené très loin ce soir-là.




dimanche 2 septembre 2012

Le Soleil a mis son pyjama.

J'ai eu envie de regrouper des morceaux qui illustraient bien ce qu'est l'ambiance de cette fin de vacances, cette espèce de schizophrénie temporelle qui place d'un côté l'envie de profiter des derniers jours inoccupés de beau temps, et de l'autre la chaleur moite et écrasante au point de nous coller sur une chaise longue.


Margaux Motin

Vous trouverez donc ici des morceaux lounge, comme on dit quand on est pseudobranché, d'autres au beat puissant et fort, toi même tu sais frère.

On commence avec Balkan Beat Box et "Dancing with the moon", morceau coolissime et envoûtant comme une danse avec la lune tsé.
Vient ensuite le plus mélancolique "Villages" d'Alpine, chanson découverte par hasard et qui m'a tout de suite plu avec son rythme bien appuyé et son côté finalement très répétitif tout en restant mélodieux.

On passe ensuite au mythique "Bom Bom Diggy" du complètement allumé Tricky, avec des couplets au flow totalement hallucinant.

La Plage de Brighton (Nooostaaalgiiiie)


Fujiya & Miyagi, c'est une grosse découverte de cette année sur laquelle j'ai eu l'énorme flemme de faire un article, je le confesse. La troisième piste de leur album Transparent Thing sorti en 2006 m'est de suite tombée dans l'oreille. J'aime le côté krautrock/electro qui se dégage de leurs chansons et le travail sur les sonorités dans les textes (et aussi, il faut bien le dire, l'accent très posh de la chouette ville de Brighton).






Comme c'est l'été, qu'on est content, que les oiseaux chantent, que les nuages ont des formes bizarres et que des smileys se dessinent sur les pilules, on ne peut qu'écouter Take ecstasy with me des Magnetic Fields, avec ses envolées de synthé planantes. Et comme la vie est bien faite, figure-toi que ce morceau est extrait de l'album Holiday, sorti en 94.

On continue dans les délires musicaux acidulés et assaisonnés d'herbes de Ducros avec Super Inuit, du très bon goupe Holy Fuck. Je crois que je n'ai pas besoin de m'étendre sur la description du morceau, un petit play suffira.

Wax Tailor fait ensuite son entrée pour nous aider à taper du pied et à nous secouer sur un bon morceau hip hop de derrière les fagots.

Puis arrive Blockhead, le chouchou des Pétroleuses découvert par V ici, avec le très beau Attack the Doctor. De l'or en musique.

Parenthèse plus sombre avec les suédois d'Asteroid et Water, issu de S/T. Une voix profonde et une guitare acoustique, que demander de plus ?

Et puis comme on n'est pas des bêtes on retourne sur le dancefloor, comme disent Brigitte Fontaine et Grace Jones, avec Jazzhole et le très bon Free the Robots.

Washington Square de Chinese Man nous garde immergés dans une belle ambiance trip-hop rythmée par un beat claquant et un refrain mélodieux.



On avance peu à peu vers plus de mélodie avec le groupe Bastille et leur morceau Overjoyed, avant d'être tout content, comme Of Monsters and Men lorsqu'ils chantent Little Talks.


Un peu de romantisme pour faire les choses bien, avec Léo Ferré et Paname, ville de toutes les surprises (je vous avait dit que j'avais raté ma vocation de pubarde) où l'on danse avec les pavés.


Et comme, c'est bien connu, on pèche tous sur les trottoirs de Paris, -particulièrement en été, c'est les hormones qui veulent à c'qui paraît ça ma p'tite dame- on se repend avec la reprise de Sinner's Prayer par Bonamassa et Hart. Le même Bonamassa appelle ensuite à la raison et la compassion avec cette très belle version de Stop !




Nouveau grand écart avec Tempdub par JFB, DJ deux fois champion DMC au Royaume-Uni. Respect.

On devient ensuite Gangsta avec les norvégiens de Kakkmaddafakka (qui n'a jamais dit dans sa phase ado rebelle "je laisse tomber les cours et je deviens riche" ?). Le clip est plutôt drôle d'ailleurs, checkez ici si vous avez cinq minutes.

Avec l'arrivée de la rentrée, on a tous ce fameux Cold Feeling, dont parlent Pretty Lights dans ce chouette morceau.

On termine enfin dans le monde du stoner avec les bordelais de Mars Red Sky et Way To Rome.

vendredi 17 août 2012

Smoky Eyes & Purple Haze

(J'ai aucune idée du pourquoi de ce titre, je le confesse).

Dans une période de procrastinationnite aiguë, je me baladais pas mal sur ce qu'on appelait la toile en juin 1989 (à vrai dire, ladite période serait plutôt du genre éternelle, mais c'est pas la question). C'est au gré d'une discussion virtuelle que je découvris Smoky Eyes avec les yeux fumants de la geekette (un jeudemotpasdrôle se cache dans cette phrase, sauras-tu le retrouver ?). Rien à voir avec le maquillage tendance je-me-suis-pris-un-paquet-de-gnons-en-plein-dans-les-mirettes dont voici une illustration (de chez Chanel s'il vous plaît Mâdâme) pour vos yeux ébahis et pas encore bordés d'anchois, il s'agit de musique bande d'ignares, et ça ressemble à ça :


Ni une ni deux, me voilà à télécharger les chansons dispos sur le site. Pas la peine de froncer les sourcils en agitant le texte de cette brave loi Hadopi, j'te jure que c'était permis m'sieur l'agent, tu peux vérifier ici. Inutile de préciser que j'ai trouvé les deux EP alors dispos plutôt sympathiques : une chanteuse avec une voix (et j'imagine assez bien une personnalité) pleine de caractère, une musique qui saupoudre une tranche de rock d'une bonne pincée de blues pour un résultat délicieusement hors du temps, et surtout, le sentiment que ces braves gens se font plaisir en jouant ensemble. Et ça mon brave, laisse-moi te dire que c'est assez cool.
Quant au dernier EP sorti en mai, il rassemble cinq petites pépites qu'on a envie d'écouter en boucle avec un paysage qui défile devant les yeux (imageniaisebonjour). J'ajouterai simplement qu'Alcohol for my mother m'a mis une bonne claque. Amen.

En bref, voilà donc un groupe à suivre mes petits. Pour ce faire, facebook est ton ami puisqu'ils possèdent une page où tu peux les aimer, et aimer c'est c'qui y'a d'plus beau, tu le sais. Et bien sûr il y a le site du groupe où les différents EP sont téléchargeables.


samedi 14 juillet 2012

O&R #7 : They'll take care of us.

Plus ou moins volontairement, on a tous déjà entendu ou fredonné "I know you've been hurt by someone else, I can tell by the way you carry yourself, But if you let me, here's what I'll do : I'll take care of you.", étécé étécé. Une bien chouette chanson, moult fois reprise, mais comme on n'est pas des bêtes, on va se pencher un peu plus avant là-dessus.
D'abord, on fait un bon en arrière. 1959, Brook Benton, auteur-compositeur interprète populaire à la fin des 50's-début des 60's (c'est  notamment à lui qu'on doit It's just a matter of time, ou encore Hotel Happiness, repris ensuite chez nous par Sheila avec Le ranch de mes rêves - eh oui) offre cette chanson à Bobby Bland. Ca donne ça : 

Avec I'll take care of you, le brave Bobby offre un morceau de choix à ses comparses. On trouve par exemple une belle reprise par feue Etta James, blues à souhait. Une interprétation majestueuse, jugez plutôt.

Dans la veine "j'ajoute un côté fins fonds du Texas", la version de Van Morrison est plutôt bien placée. En vrac, on trouve aussi Elvis Costello, un hommage vibrant de Mark Lanegan ou encore la version fragile et  très personnelle de Gil Scott Heron, que j'aime beaucoup. 
Cette dernière version, remixée par Jamie xx et devenue I'll take care of U a d'ailleurs été samplée dans le morceau Take Care de Drake et Rihanna. Epi on vous met la version "explicit" parce qu'on est des folles inconscientes, tsé.

Je termine mon panorama avec mes chouchous : Beth Hart et Joe Bonamassa, qui en ont fait un petit bijou. Je vous conseille d'ailleurs leur album Don't Explain, rempli de petites perles empruntées aux grands du répertoire soul et blues. Le morceau de Brook Benton a fait sa vie et donné naissance à des interprétations bien différentes, et c'est ça qu'est rudement bien avec les reprises ma bonn'dame.

mardi 3 juillet 2012

La bande son de l'été

(Titre pas du tout prétentieux, on est d'accord).

J'ai tenté bien que mal de rassembler des morceaux qui m'inspiraient tout ce que pouvait réserver un été à une personne normalement constituée âgée de 19 ans.




La première partie se compose de morceaux assez "lents", mais de plus en plus rythmiques. On commence doucement avec "Obedear" de Purity Ring, avec son intro envoutante, où viennent s'entrechoquer des petites touches électroniques au synthé ou au xylophone Toy's R'us, que sais-je. 

Vient ensuite ma grosse découverte du moment, j'écoute ça en boucle, "Cripple" de la canonissimme Christine et ses Queens (elle mériterait un article) qui "adore être une estropiée" ("I actually enjoy being a cripple" répète-t-elle). Morceau beaucoup trop stylé. 

Un peu plus dans l'air du temps, Electric Guest et leur "Awake", moins tonique que "This Head I Hold", certes, mais non moins efficace. Parfait pour chiller au bord de la piscine/mer.

Beaucoup moins contemporain, Alan Vega qui nous fait swinger, twister, tortiller du boule avec son "Jukebox Babe" qui donne envie de siroter un martini sur une terrasse avec ses potos d'enfance. 

Plus classique voire mythique, le "54-46 Was My Number" des Toots & the Maytals (samplés par Sporto Kantès dans le très cool "Heart"), parfait pour faire voyager ceux qui sont coincés chez eux. Irrésistible. 

On continue le voyage avec "The Anthem" de Onra dont on vous parlait dans l'article précédent. Pas besoin d'en rajouter, perso je vois des chinoises danser devant moi quand je l'écoute.

S'enchaîne le parfait remix de Wankelmut, "One Day/Reckoning Song" qui tourne en boucle dans mes oreilles depuis un mois. Parfait pour l'apéro ou les fins de soirées.

Coeur battant de la playlist, deux morceaux qui font partir loin, "Le Goudron" de YACHT (le chemin est si beau du berceau au tombeau - phrase qui me reste dans la tête depuis la première écoute) et  l'excellent et entêtant "Get Free" de Major Lazer & Amber Coffman (clip totalement fou au passage!). 

Morceau pour les lendemains de soirées ou les départs en vacances, lorsque l'on est sur la route, plein d'espoir pour les instants à venir, "Twenty Miles" de Deer Tick. Un Bon Iver plus rocailleux et péchu.

"PSCHAAAA", saut dans la piscine, les bulles qui remontent à la surface, un flou bleu. L'océan ou le chlore, peu importe, "Black Gold" des Foals nous crie d'aller piquer une tête.

Ceux qui n'ont pas l'air marin apprécieront un morceau plus "terre à terre", avec "Avant les Forêts" du talent compositeur Bertrand Belin ("Sur la peau gelée du lac, je meurs, d'aller").

Incontournable, "Barcelona" de Giulia y los Tellarini, entendue dans Vicky Christina Barcelona de Woody Allen. 

Dernière partie de la playlist, l'été touche à sa fin. Notre cycle de sommeil est totalement fucked up après deux mois d'excès (se lever à 14h après une nuit plus que blanche par exemple), gueule de bois généralisée avant la rentrée (ouuuuh le mot qui fâche). Sentiment très bien retranscrit par Sébastien Tellier avec "Un Narco en Été", entendu dans le film Narco. On se laisse doucement porter.

Revenue au goût du jour grâce à Moonrise Kingdom de Wes Anderson, "Le temps de l'amour" de la belle Françoise Hardy nous fera repenser à nos conquêtes de l'été pour les plus chanceux.

Ceux qui auront passé un été plus tristounet qu'autre chose se consoleront avec la magnifique chanson de Jackson C. Frank, "Milk & Honey" (entendue dans The Brown Bunny de Vincent Gallo). Ça met vraiment du baume au coeur. 


Enfin, l'heure du bilan, les cours arrivent, on retrouve nos habitudes ou en prend d'autres pour ceux qui changent d'endroit. T'es dans ton lit, il est 1 heure passée et tu n'arrives toujours pas à dormir, le coeur plein de promesses et d'excitation; tu cherches, les yeux engourdis, le sommeil avec "New Day" de Jay-Z et Kanye West. 





"Stay with me, never go away"


Le 12 juin sortait le dernier EP de Onra, « Deep in the night ». J'ai pu découvrir un artiste tout aussi génial (c'est-à-dire, bourré de génie) que Blockhead. Même volonté de créer des musiques-collages, livrant des albums talentueux plein de références, d'hommages.

Il faut dire qu'Arnaud Bernard, aka Onra (Arnaud en verlan, vous l'auriez compris sans moi), a un patrimoine génétique emblématique de ce qu'on appelle la mondialisation : né en 1981 en Allemagne, de parents français, son père étant vietnamien. Il a passé son enfance entre l'hexagone et la Côte d'Ivoire, où il pu découvrir un goût accru pour la musique. À 19 ans, il crée ses premiers morceaux.

Le premier morceau que j'ai pu entendre était The Anthem, morceau qui introduit l'album « Chinoiseries » sorti en 2008 après deux ans de travail. En 2006, Arnaud Bernard se rend pour la première fois au Viet Nam, et commence une véritable chasse aux trésors. Au pluriel, oui, puisqu'il se donne pour mission de ramener des sons purement ancrés dans la culture pop vietnamienne des années 60 et 70.


Il ramène en France une collection de 32 morceaux, qu'il mêlera habilement au hip hop. Un deuxième opus sort en 2011, dans la même veine, intitulé « Chinoiseries, pt. 2 », regroupant des morceaux aux influences chinoises, thailandaises et vietnamiennes.

Véritable orfèvre, il a également, successivement, collaboré avec Byron the Aquarius, producteur américain en 2007 (« The Big Payback »), avec la Fine Équipe sur « Boulangerie », et sorti un LP en 2010 bien reçu par les critiques, « Long Distance ».

Je vous laisse sur sa toute dernière chanson, un bijou hip/hop-électro- et ce petit « je ne sais quoi » qui donne envie de monter dans sa caisse et de partir vers une destination inconnue à des heures indues (cf. Drive).




source : http://en.wikipedia.org/wiki/Onra

soundcloud: http://soundcloud.com/onra/
myspace: http://www.myspace.com/onra
bandcamp: http://onra.bandcamp.com/

pour comprendre le titre ---> *

mardi 15 mai 2012

Avant que ma jeunesse s'use Et que mes vingt ans soient partis


C'est marrant comme on aime coller des étiquettes sur les gens, comme on leur interdit presque ensuite de sortir de la jolie case qu'on leur avait fabriquée et de contrarier cette sacro-sainte classification qu'on s'est échiné à opérer. Pourtant, je trouve qu'il n'y a rien de plus touchant et admirable que de voir quelqu'un s'essayer à un registre auquel il ne nous a pas habitués. Certes ce n'est pas toujours réussi, mais c'est pas le but qui compte, c'est le chemin. 
Le brave Iggy Pop, aka The Godfather of Punk est de ceux qui refusent d'être réduits à une case. Déjà annoncé entre autres par la reprise des Feuilles MortesAprès, son dernier album sorti le 9 mai dernier, pourrait laisser penser que l'Iguane a mué et laissé sa peau de passenger en route. Il n'en est rien. En reprenant Piaf, Joe Dassin ou encore Brassens avec le très beau Les Passantes, Iggy donne à voir une autre facette de son art, une autre écaille (désopilant n'est-ce pas) de sa personnalité. Parfois maladroites, ces versions n'en sont que plus touchantes, pleines d'une fragilité et d'une mélancolie surprenantes, habitées par la belle voix grave dont l'homme a le secret.



Pour le plaisir de voir Iggy arroser son potager :

dimanche 6 mai 2012

O&R #6 : The Jolly Boys vs Lou Reed.




Combien d'entre nous ont déjà fredonné "Ohhh, It's such A PERFEEECT DAY, I'm glad I spent it with you"? Évidemment, la chanson est un classique. 


Alors puisque c'est dimanche matin, on va la jouer en mode marché de poissons. Mais un peu plus classe. 

Alors ma p'tite dame à ma gauche vous avez le soleil, les îles, la voix chaude et sexy d'Albert Minott qui vous envoie direct en Jamaïque, vous avez vos hanches qui se déclenchent et se fendent d'un joli ondulé, c'est l'appel de la chaleuuuur. On a presque envie d'aller piquer une tête dans la mer la plus proche et se délecter de cocktails bien alcoolisés dans les bras de son ou sa chéri(e). Ou de finir dans un bar miteux au fin fond de l'île de Bob, enchaînant les teq pafs et les rhums arrangés. Ah, dieu que c'est bon de s'imaginer en vacances (j'ai fini les cours personnellement, soyez pas trop dégoûtés). 

Toujours pas convaincu? 

À ma droite mon bon jeune homme.. Toute autre ambiance. Vous venez de raccompagnez votre nouvelle proie, la future femme de votre vie chez elle après une merveilleuse soirée que vous avez passé à la dévorer des yeux. Vous montez les escaliers avec ou regardez le plafond de l'ascenseur en soupirant, mais avec cette petite étincelle au creux du coeur qui vous chuchote que "it's all happening". Boum boum. Vous fermez la porte de votre appart en bordel, vous vous écroulez sur votre lit: "oh such a perfect day... you just keep me hanging on". 

ALORS QUE TU AIS L'ESPRIT ROCK OU PLUTÔT REGGAE, tout le monde devrait en avoir pour son compte. 

mercredi 18 avril 2012

I ain't washin my sins.

J'ai déjà évoqué The Weeknd sur ces pages, vous vous souvenez ? Clips osés, ambiguïté, rythmes lents etc. J'avais tort. Il est encore plus que ça, et son premier clip officiel, "The Knowing",le prouve. Pour coller des images à sa musique, The Weeknd a choisi le français Mikael Columbu, réalisateur ayant entre autres travaillé avec Enki Bilal (et ça se voit !).
Personnellement, j'ai pris le temps d'écouter la chanson en elle-même avant de regarder le clip qui me captivait presque trop pour que je puisse entendre la bande-son. Même thème que d'habitude, The Weeknd parle d'un amour torturé où se mêle haine, vengeance et sensualité extrêmes. A cela s'ajoute sa voix suraigüe sur fond de riffs surprenants - mais plus qu'appropriés - qui portent le morceaux à son apogée.
La vidéo, maintenant. On ne pouvait pas attendre de cet artiste quelque chose de banal, et à raison. La révolution éthiopienne de 1974 et son dernier empereur Haïlé Sélassié prennent d'abord place dans ce qui semblent être un dessin animée cartonné. S'en suit une plongée dans un monde apocalyptique et futuriste où The Weeknd entreprend une sorte de combat fantasmagorique sur fond d'explosion d'étoiles et d'éclaboussures de sang. Ombre et lumières, femme nue et sciences occultes, The Weeknd nous sert là ce qui risque bien d'être le premier volet d'une longue série de vidéos fascinantes. En tout cas, on l'espère.

Je vous laisse juger par vous-même.
Personnellement je n'ai qu'une chose à dire : Wahou.

mardi 10 avril 2012

L'unité des carnivores.

Ce soir je m'autorise à faire ce que je ne me serais jamais cru capable de faire: une pseudo chronique sur un groupe de musique.
Veuillez agréer, mesdames, messieurs, mes sentiments les plus mitigés.

Qu'est-ce qu'une chronique musicale? Une critique, un avis, une réflexion? Un peu de tout ça, mêlé, je pense. Cela exige aussi un certain professionnalisme tout de même, que je n'ai pas et n'aurait sans doute jamais. Mes maigres connaissances en matière de solfège ne me permettront pas à décrypter objectivement ce que le mec a voulu faire à tel moment. 

Mais si je peux vous donner l'envie d'écouter les petites pépites qui vont suivre, alors j'aurai accompli ma mission.



Reprenons.

Téléchargeuse compulsive, downloadeuse effrénée (oui, c'est mal), je suis de ceux qui peuvent passer des journées entières à explorer des univers musicaux inconnus. Tel Indiana Jones, je me fraie des chemines au sein de cette brousse musicale. Ces découvertes sont parfois fJ'ai des morceaux que je chéris plus que tout et suis capable d'écouter 10 fois de suite. Ceux que j'écoute à des moments précis, pour me rappeler. 

Et les autres.
Je pense que la musique s'apprivoise. Et je trouve ça très intéressant de voir à quel point on écoute sans arrêt, toujours, les mêmes morceaux finalement. Alors, parfois, dans mes bonjours, je ne clique pas directement sur ">>" quand apparaît un titre que j'ai téléchargé il y a deux semaines et que je n'ai pourtant jamais écouté. Je prends le temps, je me fais violence pour ne pas écouter "Blue Jeans" pour la 26ème fois consécutive.
Ça passe ou ça casse.

(ça va? j'ai bien réussi à justifier que cet article va être pourri ? COOL)


Pour "Blockhead", c'est passé, même plutôt bien.


"Insomniac Olympics"
I live life around 2 am nights. I live two lives, The hood. Just to see a little blood.

Bon là, je me suis dit "putain", clairement.
J'ai eu il y a quelques semaines une grosse période Wax Tailor/Sporto Kantes, et Blockhead s'est imposé, comme une évidence.
Puis j'aime bien le type, il a jamais conduit une putain de voiture de sa vie. Comme moi. 


Épaulé par son compère Def Jux emcee Aesop Roc (sisi, j'vous jure), le gus a sorti 5 albums solos dont le magnifique "Music by Cavelight", littéralement : musique à la lumière de la caverne. La particularité de l'album est qu'il est entièrement instrumental. Pas de blabla sur la beauté de la vie et la couleur des sentiments, Blockhead va droit au but. Quelques fragments de samples parlés peuvent être entendus (ce qui rappelle Wax Tailor), des petites voix chevrotantes qui sentent bon le passé et la poussière qui se dépose sur les vieux meubles. Comme si Blockhead déterrait de vieux trésors et nous racontait des histoires à partir de presque rien. Sorcier un peu. Tout au long de l'album, on peut que s'étonner de la variété des genres musicaux exploités (des sons orientaux, du hip-hop pur et dur, du mystique, du rock, de l'indé); bref, il refuse d'orienter tout son travail dans une seule et même direction. Et pourtant, tout coïncide. Les sons de l'"Imbécile" sont le produit d'une recherche poussée de sons bruts, sombres et dépouillés. Sorcier mais scientifique aussi donc. Le piano provoque de l'émotion, la basse rend l'atmosphère presque liquide, et la batterie est toujours là, tapie, à marteler ses angoisses :


Some nights it just gets worse than others.
Some nights, it just, Gets worse.
I feel terrible.
But what can we do?
I don’t know.
It’s just, a feeling I’ve got.
Like, something’s about to happen,
But I don’t know what.


Wikipedia m'indique également que les "scratches" sont d'Omega One, la guitare et la basse de Damien Paris du groupe The Giraffes (toujours plus les mecs...), et le violon de est joué par les mimines expertes de Baby Dayliner. 

La beauté du truc c'est que le mec a réussi à se faire un nom à New York en tant que DJ. Il est même considéré comme un petit génie  lorsqu'il sort "Labor Days". 

samedi 31 mars 2012

Cure de Vitamine D.

Ernest Biéler, Die Geheimnisvolle

Du beau soleil ces derniers jours, et même si c'est un peu moins le cas aujourd'hui, j'avais envie de vous concocter une petite playlist gorgée d'UV et de Vitamine D. De la nouveauté comme du classique, mais dans l'ensemble du son à base d'endorphines qui met de bonne humeur !
Courage mes petits, bientôt les cocktails, le sable entre les doigts de pied et l'odeur de monoï.

samedi 24 mars 2012

I think I'll call it morning



Sortir la galette noire de sa pochette cartonnée, la poser. Actionner le bras, mettre tout doucement la tête dans le sillon. Craquement. Voix éraillée, brisée, textes graves.
Gil Scott-Heron. Le génie qu'on oublie trop. Ingratitude des contemporains pour ce qu'on leur a laissé. C'était quelqu'un d'engagé, d'atypique, un marginal, dans le bon sens du terme (pourquoi être en bordure serait-il péjoratif d'ailleurs ?). Une poésie scandée ou chantonnée, mais toujours habitée. Sur l'album I'm new Here, c'est la voix parfois chevrotante d'un vieil homme que l'on entend. Une voix fragile par moments, mais sans concession pour celui qui se regarde dans le miroir.



Standing in the ruins of another black man's life Or flying through the valley separating day and night, "I am Death", cried the vulture for the people of the light. Karon brought his raft from the sea that sails on souls And saw the scavenger departing, taking warm hearts to the cold. He knew the ghetto was a haven for the meanest preacher ever known In the wilderness of heartbreak and desert of despair. Evil's clarion of justice shrieks a cry of naked terror Taking babies from their mamas, leaving grief beyond compare. So if you see the vulture coming, flying circles in your mind, Remember there's no escaping or he will follow close behind. Only promise me a battle. Battle for your soul, and mine.

 Tout est mis à nu, de la déliquescence du corps et de l'âme face à la drogue -qui l'avait déjà rendu célèbre avec Angel Dust ou The Bottle - à une enfance tendue ( le très beau On Coming From a Broken Home, sorte d'alpha et d'oméga de cet album). Des textes en forme d'autobiographie, mais pas de confession. Si Gil Scott-Heron pouvait alors donner, selon certains, l'image d'un vieux débris rempli de crack qui tentait de rappeler son existence au grand public en écrivant cet album depuis la cellule où il purgeait sa peine pour trafic de cocaïne, on décèle sans peine une âme, une dignité sans faille sur ces morceaux qu'on devine accouchés dans la douleur. Ce serait dommage de l'oublier.
Gil Scott-Heron est décédé le 27 mai 2011 à New York, à l'âge de 62 ans. On l'entendrait presque encore chanter, comme un clochard céleste sur les traces de Kerouac :

Yeah the doctors don't know, but New York was killing me,
Bunch of doctors coming round, they don't know
That New York is killing me
Yeah I need to go home and take it slow in Jackson, Tennessee




I 'm gonna take myself a piece of sunshine and paint it all over my sky. Be no rain. Be no rain.  

mardi 13 mars 2012

Learn to love yourself.

Ca fait longtemps que cet article attend dans un coin de ma tête. Je ne sais toujours pas vraiment comment le commencer. Je ne crois pas qu’il en aura pour autant moins de valeur. Il vient de mon ressenti personnel certes, mais si je l’écris aujourd’hui c’est surtout après avoir observé le monde qui m’entoure, après vous avoir observé, vous.

Une discussion entre étudiants allongés dans l’herbe, au soleil, les procès qui fleurissent contre le régime Dukan, un ami au régime, un autre mal dans sa peau. Il n’y a pas besoin de se rendre dans le cabinet d’un diététicien pour parler de nourriture, de maigreur, de corps. Oui, de corps, ce n’est pas un gros mot. De nos jours, qui ne se soucie pas d’être mince (maigre), bronzé, en bonne santé ? Healthy & skinny, bienvenue dans le nouveau moto du 21ème siècle. Ou peut-être pas si nouveau que ça en fait.

Je commencerais cet article en expliquant simplement le culte de la maigreur qui s’est installé bien confortablement dans notre société (et dans nos têtes). Il y a deux phénomènes à prendre en compte. Tout d’abord, comme vous avez pu le remarquer, les canons de la beauté évoluent avec les époques. Les tableaux de la Renaissance montre des blondes pulpeuses à la peau de porcelaine, alors qu’aujourd’hui l’idéal est bronzée et à les os saillant. Pourquoi ? Très simple : à l’époque, la majorité de la population travaillaient dans les champs et crevaient la dalle (donc était très maigre et très bronzée), alors qu’aujourd’hui on bosse dans des bureaux avec néons et on souffre de malbouffe. CQFD.

Deuxième phénomène : la mode, au départ un petit milieu, a du s’industrialiser. Oui, il a fallu faires des défiles & des collections plus rapidement et à plus grande échelle. Et pour cela, on a trouvé une méthode fabuleuse. Puisqu’il devenait trop gênant que le vêtement s’adapte à la femme et à ses formes, la femme s’adapte maintenant aux vêtements. Et oui, toutes les mannequins ont aujourd’hui la même forme : celle de leur squelette.


J’en viens donc à parler d’un sujet qui le mérite bien : le monde de la mode. Loin de moi l’idée de le condamner entièrement, j’ai voulu y travailler et j’éprouve toujours pour lui une grande fascination. Ca ne l’empêche pas de me foutre la gerbe.

Je ne peux pas pardonner à ces gens qui savent très bien qu’ils ont une influence sur la moitié de la planète et qui agissent de manière totalement inconsciente. Je suis la seule à avoir des envies de meurtre quand Monsieur Lagerferld déclare placidement que « une femme n’est jamais assez maigre » ? Et Madame Kate Moss est bien sympa de faire passer des excuses par son agent, mais en attendant, une fois qu’elle a dit « nothing tastes as good as feeling skinny » dans l’heure qui suit on retrouve cette phrase sur tous les blogs possibles.

Mais ils ne sont pas les seuls coupables. Notre cerveau est bombardé : affiches, clips, magazines, pubs. Il y a partout le même murmure constant : maigre-maigre-maigre. Si bien qu’on a l’impression que pour ne pas penser « trop gros(se) » le soir en rentrant chez soi, il faut être une sorte de surhomme à l’esprit entouré de kevlar. Les magazines sortent les derniers régimes à la mode à l’approche de l’été, l’appel du McDo n’en est pas moins fort pour autant, votre meilleur pote est plus maigre/musclé/bien foutu que vous. Ce monde nous demande à la fois de consommer au maximum Kinder Bueno et Coca Cola tout en étant rachitique ou bodybuildé. Pas étonnant qu’on finisse tous à moitié bipolaires.



Mais il ne faudrait pas non plus se déresponsabiliser. Le culte de la maigreur ambiant, nous l’entretenons tous les jours par nous-mêmes.

La façon dont nous nous comportons, souvent guidée par nos angoisses en fait, est conditionnée par ce vieil idéal stupide. On se retourne toujours sur cette fille si mince, on s’extasie devant les abdos démesurés d’un mannequin pour DIM, on commente l’assiette du voisin, on se plaint d’être trop gros, on se sent mal, bref, on flippe.

Pourtant, on a le choix non ? Même si c’est difficile. Oui, c’est devenu difficile voir impossible d’aimer son corps, s’accepter, ou simplement envoyer foutre le système. Je sais bien que ça n’a pas franchement de valeur parce que c’est moi qui le dit et que je conteste toujours les valeurs en place et que je ne veux jamais faire comme tout le monde. Mais est-ce que je suis la seule à trouver que ce soit dingue de voir à quel point nos propres corps nous sont devenus étrangers ? On prétend être à l’aire du libertinage, du libéralisme, de la libération. Vraiment ? Certes, les maillots de bain nécessitent de moins en moins de tissus, pour autant, crains-t-on moins l’épreuve de la plage ? Je ne crois pas non. Ca ne reste que mon opinion. Il y a aussi le fait que si on demande aux femmes et de plus en plus aux hommes, c’est parce que ça permet d’ôter le caractère sexuel d’un corps. Et dans nos sociétés la sexualité est ultra contrôlée même si on fait semblant du contraire (mais bon, ce n’est pas le sujet). Je n’arrêterais toutefois pas de le gueuler : la plupart des images que vous voyez sont retouchées à outrance, les mannequins et les stars sont anorexiques, les stars font des régimes à la con et portent des gaines. C’est pas glamour, mais en attendant, c’est la réalité.

Je crois qu’accepter son corps, c’est la solution la plus difficile dans toute la liste. C’est tellement plus simple de considérer que pour être beau il faut un format particulier, un poids idéal, un style vestimentaire. C’est comme quand on veut se faire croire qu’avec une voiture, un palace et un compte en banque avec plein de zéros, on sera heureux. Ce serait tellement plus simple. Et c’est tellement plus simple de le croire. Parce que c’est à portée de main. Finalement, tout le monde peut un jour arrêter de manger, faire de la chirurgie esthétique ou une cure de protéines. C’est beaucoup moins dur que de se regarder dans un miroir. Mais c’est aussi beaucoup moins valorisant.


Parce qu’en fait, maigrir, dans l’absolu, tout le monde s’en fout. Pourquoi veut-on ressembler aux unes des magazines ?

Parce que correspondre à l’idéal du « beau » , c’est être bien vu, ne pas subir de critique. C’est un idéal qui – on pense – nous permettra de nous sentir mieux dans la société, avec les autres, et surtout avec soi-même. On s’amaigrit pour grossir dans son estime. L'amour, l'estime de soi & la confiance ne sera jamais une question de kilos. On ne se change pas en changeant son poids. On est obsédé par notre image parce qu’on veut être attirant, aimé, respecté, remarqué parce qu’on a tous besoin de reconnaissance et c’est putain de normal. Ca n’empêche pas que les stéréotypes et les diktats de la minceur sont un ramassis de conneries. Vous voulez connaître votre poids idéal ? Je peux le donner pour chacun de vous : c’est celui où vous êtes en bonne santé et où vous vous sentez bien. Ni plus ni moins. Et celui ou celle qui ose vous dire le contraire est un crétin fini qui ne mérite même pas votre attention. Voilà qui est dit.

C’est dur à voir, à ressentir. Mais arrêtez d’acheter des magazines, rendez-vous ermétiques à toutes ses images de perfection factices, sortez, regardez le monde avec des yeux nouveaux, mentez-vous si nécessaire. Les humains ne sont pas des kilos. Vous êtes humain.

«On maigrit parce que l'on veut de l'espoir. Les femmes qui souhaitent maigrir toujours plus font une projection sur leur future minceur, elles pensent que leur vie, dans tous les domaines - relations sociales, professionnelles, affectives - sera meilleure lorsqu'elles seront minces, qu'elles réussiront mieux dans leur travail, qu'elles seront plus dignes d'être aimées, etc. Car la minceur, et donc la maîtrise du poids, est devenue la mesure étalon de la capacité de chacun à dominer et à réussir sa vie. [...]

Maigrir procure une jouissance psychique, celle de maîtriser sa vie. Par ailleurs, c'est aussi une manière de montrer leur autonomie, leur côté vivant et sauvage, alors que l'on vit dans une société de consommation».

Ce que cet extrait montre aussi, c’est que maigrir est thérapeutique. En maigrissant, on se soigne, on se purifie. En tout cas, c’est l’impression qu’on a. Pourtant, tout ce qu’on fait généralement, c’est se foutre en l’air. Il n’y a qu’une seule et unique manière de maigrir et c’est de manger à peu près équilibré et faire du sport. C’est très chiant à entendre (à lire aussi je suppose) et beaucoup moins sympa que de croire aux promesses de régimes miracles (grâce auquel vous reprendrez deux fois plus de kilos que ce que vous aviez perdu).

On a fini par traiter notre corps comme un étranger, voir carrément un ennemi. On le tord, on le malaxe jusqu’à la moelle pour qu’il plaise aux autres. Et finalement, avec dix kilos de moins, on ne se plait toujours pas. C’est normal. Personne ne pourra jamais aimer votre corps comme vous pouvez le faire. Essayez. Essayez parce que je jure que ça en vaut la peine. Parce que ne pas supporter les miroirs et pleurer à chaque fois qu’on a le malheur d’en croiser un, ça n’a pas de sens. Vous ne serez jamais parfaits. On essaye de nous faire croire que telle ou telle chose peut nous transformer, mais non. Vous êtes vous, et c’est irrémédiable. Mais c’est bien comme ça.

Le corps humain se dissèque, mais aussi, il se respecte. En le maltraitant, on ne fait que rejeter ce que l’on estime de détestable en nous. Mais nous avons tous une part d’ombres, et elle mérite qu’on la respecte. Elle a souffert. Votre corps aussi. Et ce que j’ai appris, c’est qu’un corps pardonne rarement, et jamais totalement. Foutez-le une fois en l’air, vous pouvez être sûr que ce sera la dernière.

La première fois que je me suis vraiment regardée, c’était dans le miroir d’une salle de danse. C’est là que j’ai commencé à accepter. En faisant du modèle vivant, je me suis rendue compte que dessiner des filles maigres étaient très ennuyeux. Les formes sont bien plus drôles. Elles font des traces bien plus jolies sur le papier.

Je me suis aussi trouvé belle dans le regard de certaines personnes qui se reconnaîtront pour certaines. S’il n’y a pas de remerciements assez forts pour cela, il y a une chose à en retenir : vous avez du remarquer que lorsque vous aimez une personne, vous avez tendance à la trouver plus belle, à vous fichez de ses défauts, à apprécier son langage corporel. Et bien pour vous, c’est pareil.

Le matin, faites-vous un grand smile dans le miroir. Ce n’est pas parfait, mais c’est vous, et ça vous correspond. Et si jamais quelque chose ne vous convient vraiment pas, notre monde regorge de solutions : coiffeur, maquillage, crèmes de toutes sortes, câlins, salles de sport et j’en passe ! Et puis si un jour vous avez : une tronche de déterré, des cernes, mauvaise haleine, la crinière indomptable (avec les règles ou la gueule de bois en bonus) et pas envie d’être beau, bah merde, vous avez le droit !

On a qu’une vie et je trouve ça rudement dommage de la passer à se dire « je suis moche ». Trouvez ce qui vous émoustille, la vie c’est fait pour ça. Moi c’est la danse, la course, vous ça peut être n’importe quoi. Ah, et petit rappel, manger ne fait grossir, non, ça fait plaisir. Et le principe de la vie à la base, c’est ça, se faire plaisir.

Et vous savez quoi ? Je refuse de croire qu’être beau est une question de poids, de musculature ou de longueur de cheveux. La plus belle fille que j’ai jamais rencontré est petite et porte une crête. Je la trouve belle parce qu’elle brille. La beauté c’est ça. C’est aussi cette personne qui se ramène avec charme et assurance. Et Weight Watchers n’a rien à voir avec ça.

J’ai quelque chose d’encore moins agréable que le reste à dire (mais comment fait-elle pour trouver des choses toujours plus déplaisantes ?). Si nous sommes toujours plus obsédés par nos corps, c’est aussi parce que nous sommes toujours plus narcissiques. Je ne renie absolument pas le mal être corporel universel, mais notre société pousse à l’individualisme et l’égoïsme et ce dans tous les domaines. Avoir quelques kilos en trop ou un bouton sur le nez n’a pas le même niveau d’importance que l’état actuel de la Syrie ou tout simplement le dernier rencard de votre meilleure amie. En gros, on respire et on fait un câlin à la première personne qu’on croise. Ca va mieux après.

C’est pas dur de voir ce qu’il y a de beau chez les gens. Parce qu’on a tous quelque chose de beau. Je vous jure c’est fou. Les gens foncièrement laids sont très rares. A vrai dire, presque inexistants quand on sait regarder.

Il y a aussi des gens qui vont dans le bons sens et se battent contre les diktats de la minceur. Je salue entre autres Sophia Bush pour sa campagne « zero is not size » et pour avoir refusé de maigrir pour satisfaire Hollywood. Toutes n’ont pas sa force de caractère et d’esprit, surtout dans ce milieu. On pense aussi à Isabelle Caro, qui a eu le courage de participer à une campagne contre l’anorexie. Elle pesait 31kg pour 1m64. Elle est décédée à 28 ans. J’espère qu’un jour on vivra dans un monde où aucune fille de 14 ans ne dira « je suis grosse » alors qu’elle pèse moins de 50 kilos pour 1m75.

Alors il faut rester éveillés à la beauté, quelque soit la forme (ou les formes) sous laquelle elle se présente, parce que la beauté ne se chiffre pas, parce que notre valeur ne dépend pas du nombre qui s’affiche sur la balance.

Le personnage de Derek dans American History X dit qu’il est bien de finir une rédaction par une citation. Ayant eu la chance d’être entourée de personnes qui savent trouver les mots, c’est ce que je vais faire. Parce que certains mots n’ont pas d’égal…

« Tu prends un malin plaisir à gâcher ta beauté... Comme si tu croyais que tu ne mérites pas d'être saluée pour tes vertus... C'est con quand même... Tu es belle, et tu t'efforces de vouloir disparaitre. Tu es intelligente et tu t'évertues à te mettre le crane...

Accepte toi aussi magnifique que tu es. »


Je crois que tout est dit.